Pour Republik IT, Jean-Charles Bordes, Président de l’Open CIO Summit, évoque l'évolution du rôle des DSI face aux défis géopolitiques et à l'innovation technologique.
Le 18 mars 2025, à l’Hôtel Lutetia à Paris, se déroulera une nouvelle édition de l’Open CIO Summit, pour la première fois sans lien avec l’Open-Source Expérience qui a eu lieu les 4 et 5 décembre derniers. Le président de l’Open CIO Summit, Jean-Charles Bordes, nous en parle.
Quels sont les objectifs de l’Open CIO Summit ?
Ils n’ont pas changé depuis la première édition. Il s’agit toujours de placer l’open-source et l’innovation au cœur des enjeux des DSI des secteurs privé et public. Les DSI partagent avec leurs pairs leurs difficultés, leurs convictions, leurs méthodes et solutions pour faire face aux changements. L’Open CIO Summit est en effet un événement pour les DSI et par les DSI.
Jusqu’à présent, l’événement était franco-français. Désormais, il acquiert une dimension européenne avec une keynote dédiée aux initiatives collectives en Europe. Enfin, bien entendu, cela reste aussi un prétexte pour se rencontrer autour d’intérêts communs.
Quel est le programme de cette édition ?
Le programme est très lié à l’actualité géopolitique et les stratégies numériques des DSI. Le rôle de chaque DSI n’est plus seulement d’être le leader numérique qui renforce la compétitivité mais il doit également construire des entreprises résilientes, indépendantes et sécurisées.
Après l’introduction réalisée par Emmanuel Sardet, Parrain de l’Open CIO Summit de cette année, Président du Cigref, Deputy CIO et Group CTO du Crédit Agricole, nous aurons trois sessions successives autour de trois thèmes. Il est nécessaire de prendre le temps d’échanger sur ces sujets.
Djilali Kies (CIO de TDF) et Yann Daudin (Responsable Département Innovation, France Travail), interviendront sur le thème « Innovations technologiques : quels nouveaux enjeux et quelles opportunités pour les systèmes d’information ? ». Il s’agira de comprendre les tendances et intégrer les nouvelles opportunités technologiques dans un cadre méthodologique et une gouvernance particulières, l’alignement avec la stratégie d’entreprise et parfois même de s’appuyer sur une démarche d’autonomie stratégique numérique. Ils se baseront sur la publication du Cigref « Innovations technologiques et valeur pour les SI ». Ils étaient membre du groupe de travail ayant réalisé ce livrable. Celui-ci intègre un Tech Radar : IA, informatique quantique, 5G & 6G… Il s’agit de comprendre le vraies tendances technologiques et de s’assurer de leur pertinence et de leur pérennité.
La deuxième session sera une table ronde sur le thème « Être DSI à l’ère de l’IA et de la Data : comment bâtir durablement la confiance ? ». Elle sera introduite par Jean-Claude Laroche, actuellement directeur de mission à la Direction du Parc Nucléaire et Thermique d’EDF, ancien président du Cigref et DSI d’Enedis. Y participeront plusieurs DSI comme Guillaume Deudon (Chief Digital Officer de Somfy Group) et Lionel Chaine (Directeur des Systèmes d’Information de Bpifrance). La question de la stratégie numérique dans un contexte géopolitique en pleine mutation y sera traitée ainsi que, également, l’accompagnement et la responsabilisation des collaborateurs et l’enjeu d’un cadre de confiance qui ne doit pas freiner l’innovation et la performance.
Pour terminer, avant le cocktail dînatoire et l’atelier oenologique, Jean-Philippe Balança, Chief International Operations Officer du groupe Smile, interviendra sur le thème « Autonomie numérique européenne : pourquoi promouvoir une stratégie d’innovation collective ? ».
Précisément, les DSI ne sont-ils pas prisonnier des innovations voulues et proposées par les GAFAM ?
Le rôle du DSI continue de changer. Il doit affronter des éléments de contexte tels que les risques géopolitiques et l’emprise des GAFAM. Il est sur-sollicité et même défié sur l’innovation mais l’entreprise doit rester autonome. Elle doit maîtriser cette innovation.
Vu le contexte et l’actualité, la data et l’IA sont évidemment des sujets centraux. Deux-tiers des collaborateurs souhaitent se saisir de l’IA. Mais ils y voient une difficulté dans l’appropriation, ne connaissant pas les risques liés à son utilisation, la donnée notamment. Il y a également une inquiétude au sujet de la transformation de leur travail. Cela est dû notamment à un manque de compétences internes, un manque de temps et de méthode d’accompagnement.
Peut-on envisager une autonomie stratégique ?
Je pense qu’il faut aujourd’hui favoriser une approche hybride, ce qu’on appelle une autonomie stratégique numérique ouverte. Cela vise à améliorer notre indépendance européenne dans les domaines les plus critiques tout en maintenant l’ouverture commerciale avec des acteurs non-européens. L’Open Source est un levier puissant pour assurer plus d’autonomie et d’indépendance !
De toute manière, à court terme, l’Europe et la France ne sont pas prêtes. Les annonces de 2024 (Plan France 2024, l’IA Act, etc.), les initiatives technologiques (Mistral par exemple) et les investissements doivent être bien plus significatifs. Il faut une volonté politique plus forte et une mise en œuvre « industrialisée » du cadre juridique.
Mais, alors que le Data Privacy Framework (DPF) est remis en cause par la nouvelle administration américaine, les GAFAM restent des fournisseurs privilégiés par les DSI. Comment s’en sortir ?
C’est en effet une bonne question ! la DPF n’est pas remise en question seulement par l’administration américaine d’ailleurs : elle comporte des failles pour les européens également. Comme je le disais, le « Tout Souverain » est impossible. Une clé pour les DSI est de s’appuyer sur une approche pragmatique de la gestion de la donnée critique et non critique.
Et pour plus de réponses de la part de nos DSI cette fois, je vous invite à assister à la prochaine édition l’Open CIO Summit !